

“Je suis venu sur terre avec une force innée. Dès le ventre de ma mère j’ai eu le casque à pointes, une forme d’armure et d’agressivité”dit-elle en s’appuyant sur la table en formica, serrant sa flasque de vin blanc. Le Café sans nom : brouhaha, chaleur. Zazie habite désormais à deux pas de ce bar-restaurant de la place de la Réunion, au 20.e arrondissement de Paris. Et ici vous rencontrez. Au mur, sous les miroirs, des photos en noir et blanc de Jimi Hendrix, Serge Gainsbourg ou Patti Smith. Sur le zinc de l’ancien Tabac de la Réunion – les lettres cursives des carreaux d’entrée en témoignent –, le vieil homme du quartier trinque tandis que les nouveaux habitants de la gauche. artistique bavardage sur les sièges en moleskine.
“J’aime écrire dans des endroits où il y a des gensexplique la chanteuse en tirant sur le col roulé de son pull. Comme Lavomatique où je trouvais l’inspiration, les cafés sont un bon vivier. Il y a des morceaux de vie qui traînent, des discussions… Cafés et trains : j’y retrouve le mouvement qui m’agite. » Elle lève son verre. “Même si un café, quand on est peu connu, ça peut être compliqué. »
Isabelle de Truchis de Varennes, 58 ans, dite Zazie, dix albums studio au compteur et onze – Aile P – sorti avant les vacances. Auteur (Allume le feu, de Johnny Hallyday, est la sienne), interprète, bien sûr, et aussi jurée populaire de “The Voice”, dont la douzième saison est diffusée sur TF1 à partir du 25 février. Enfance à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), version ouvrière (père architecte mais aristo sans le sou, mère pianiste), et, dès l’âge de 12 ans, ce surnom, emprunté à l’héroïne culottée du livre de Raymond Queneau, qui a vu son adaptation cinématographique. Puis c’est le Lycée Molière, à 16 anse quartier de Paris, où ses parents l’envoient de peur que cette grande (1,79 mètre) fille branchée “garçon manqué”, comme elle le dit, ça ne va pas mal. Le choc est rude. “Je n’avais pas les codes”elle explique.
“Quand je serai grand”
Baccalauréat en poche, elle lui servira à trouver un destin : études de kinésithérapeute, Langues O’, tentée par le journalisme, devenir mannequin… Avant 26 ans, après avoir compris que sa plume peut faire naître de belles chansons, enfin la signature son premier contrat de disque. Son nom aristocratique apparaît alors plus comme une punition qu’un avantage pour une future reine de la pop. L’auteur-compositeur Etienne Roda-Gil l’incite à choisir le blasé. ” Varenne », suggère. Mais c’est l’héroïne de Raymond Queneau qui lui colle à la peau. “C’est pratique, un avatar publicvous remarquez. Je ne suis pas Zazie tous les jours, je le suis quand je fais des choses extraordinaires. Il est la personne rêvée en moi. La personne qui continue à rêver. Qui, à presque 60 ans, pense encore : “Quand je serai grand.” »
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